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LOT 31

2 500 / 4 000 €

Les Simonnet, Jean-Marie (1939-2024) & Marthe (née en 1942) Simonnet dits

Table sculpture Puzzle

En fibre-verre laqué de gelcoat blanc, signé et numéroté 150/300

H. 40 cm L. 75 cm

Marthe (née en 1942) et Jean-Marie (1939-2024) Simonnet sont un couple d’artistes. Il se sont rencontrés en 1964 aux Beaux-Arts de Paris. Depuis six décennies, ils mènent conjointement une recherche artistique constante sur la forme dans le matériau le plus emblématique du XXe siècle, devenu le plus controversé du XXIe : le plastique.

L’apparence industrielle et le caractère érotique de leur œuvre ont longtemps perturbé le public. Le message reçu est pourtant erroné, chacune de leurs œuvres naît dans leur atelier, constituée d’un assemblage de modules en fibre-verre imaginés et fabriqués par eux, dans une optique de prolifération. Leur raisonnement est à la fois mathématique et empli de poésie, il vise la forme infinie, à l’image de celle que nous propose la nature.

« Les modules sont aux sculptures ce que les mots sont aux phrases, des composants du sens. » Jean-Marie Simonnet

Au début des années 60, la conquête de l’espace passionne le monde et inspire les artistes. La science, les formes aérodynamiques, l’existence supposée des extraterrestres ont une influence directe sur les arts plastiques, le design et l’architecture : de l’Atomium de Bruxelles (1958) au Palais Bulles d’Antti Lovag (1975), en passant par la mythique Panton chair (1967).

Ayant tout deux étudié l’architecture aux Beaux-Arts, Les Simonnet construisent une démarche « modulaire », composée de volumes (cylindres, demi-sphères, portions de tores…) combinés et permettant d’envisager une création infinie, à l’image du vivant. Ils font le choix de la sculpture et prolongent les expériences biomorphes d’Henri Moore, Jean Arp, Barbara Hepworth… faisant le pont entre la géométrie et l’organique. Dès 1968, ils se font connaître avec leur installation de 12 polymorphes aux couleurs éclatantes pour le « Musée des Sables » de Port Barcarès.

L’abstraction prend vie et provoque la réaction : leurs polymorphes non identifiés amusent, gênent, suscitent admiration ou interrogations. Impossible de rester de marbre !

Venu du grec « plastikos », relatif au « modelage », le terme plastique signifie « qui a le pouvoir de former ». C’est ce pouvoir ancestral du sculpteur que les Simonnet ont souhaité conservé en utilisant le plastique.

Derrière son aspect industriel, la démarche du couple est entièrement artisanale. À deux, sans assistants, ils créent leurs moules et leurs modules, procèdent aux réparages, les peignent, les assemblent, installent et désinstallent leurs sculptures.

« Contrairement à d’autres matériaux, comme la pierre ou le bois, le polyester ne restitue que ce qu’on lui donne, une forme, une couleur, une matière ». En réalisant des sculptures creuses et légères, résistantes aux conditions extérieures, faciles à déplacer, les Simonnet maîtrisent tout. Ils connaissent également les coûts de production, n’ont pas à faire appel à des aides extérieures (fonderie, sous-traitants…) et leurs modules sont interchangeables : une fois la sculpture démontée, ils pourront servir à en constituer une nouvelle. Sous leurs doigts, le plastique a toujours été recyclable !

À l’image de leurs sculptures, les tableaux des Simonnet sont intégralement exécutés par eux, de la peinture à son support. Il en va de même côté design (lampes, tables, chaises…) et pour les modèles réduits de leurs polymorphes où seule l’échelle des modules est modifiée. Ainsi les Simonnet n’ont jamais été « à la merci » des commandes et préservent leur indépendance et la pureté de leurs idées, depuis 60 ans.

La dimension ludique de l’œuvre des Simonnet est évidente, quasi immédiate dès lors que l’on accepte d’abandonner notre vision d’adulte. Le couple s’en est rendu compte dès sa première installation en 1968 à Port Barcarès : à peine implantés, les 12 polymorphes ont éveillé les regards, provoqués les exclamations des passants, l’envie de toucher et jusqu’à escalader pour les plus jeunes - et téméraires -.

Paradoxalement, c’est la rationalité, le raisonnement quasi scientifique des artistes qui mène au jeu. Les modules permettant une infinités de combinaisons, ils peuvent se développer comme des possibilités illimitées. Cela explique le succès des artistes auprès des enfants, pour qui ils construisent de nombreuses aires de jeux, la plupart du temps totalement abstraites. Le couple souhaite que l’audience laisse libre court à son imagination, manipule jusqu’à s’approprier leurs œuvres et leur potentiel collectif.

Cette démarche, ils l’appliquent au mobilier, créant des lampes biomorphes, des tables « puzzles » , des tables « matelas », ou encore des reliefs muraux pouvant être assemblés… Divertissant et coloré, leur design témoigne de ce désir profond d’interaction avec le public. Toujours amusés et novateurs, ils vont jusqu’à faire voler leurs sculptures, inventant des cerfs-volants à l’image de leurs œuvres, jamais observés auparavant …

Volontairement ou sans arrières-pensées, les Simonnet ont toujours provoqué, choqué, interrogeant la perception des choses de celles et ceux qui les regardent. Les adultes voient dans leurs sculptures des formes érotiques, certains détournent le regard… les artistes, ayant gardé leur âme d’enfant, s’en amusent.

Lorsqu’ils ont pour projet, à la fin des années 70, de construire leur propre maison en plastique, ils sont envoyés au tribunal par une association de voisins… Contraints de faire marche arrière, ils protestent à leur manière et pose sur leur terrain une Chaise blanche de 4,50 mètres ! Accusés de « construction sur un espace boisé protégé », ils seront reconnus « coupables de grandeur et de blancheur, qui constitue une rupture dans l’environnement ». Cette même chaise sera exposée au Grand Palais et plus récemment au Centre Pompidou de Metz.

Dans les années 2000, Marthe et Jean-Marie se font un malin plaisir d’y ajouter une dimension en créant une nouvelle série de sculptures avec un matériau dont ils disposent en abondance : l’herbe tondue de leur jardin. « Nous sommes en possession de deux matériaux très opposés dans leur expression. L’herbe hachée, comme un reliquat de la nature, un déchet fibreux, et le stratifié polyester que nous traitons en surface polie, épurée, abstraite, produit abouti d’une technologie d’aujourd’hui. » Pari réussi : au contact du plastique, le déchet organique devient noble sans se renier, et le couple fait à nouveau dialoguer innovation et récupération ! Leur sculpture Cavités douces, est récompensée du Prix de la Fondation de Coubertin dans le cadre du Salon de mai 2007.

Guidés par le plaisir de créer, Les Simonnet se définissent comme « baroques, libres et structurés ». Leurs courbes, leurs couleurs vives et leurs assemblages s’imbriquent, dans une science sensuelle, un jeu rationnel, s’amusant des contradictions. Comment passer devant l’une de leurs sculptures sans avoir l’envie de tendre la main, de toucher ?

Nombreux sont les couples d’artistes de notre ère à exercer des recherches conjointes : Sonia et Robert Delaunay, Claude et François-Xavier Lalanne, Niki de Saint-Phalle et Jean Tinguely… Aucun n’a fait le choix radical de sacrifier l’ego individuel pour le partager. Seuls Les Simonnet qui depuis 60 ans font œuvre et vie commune, signent toutes leurs créations d’un seul nom.

Simon Barjou-Morant

Vente hors-série #459

samedi 22 février 2025 à 10h30

Les Redécouvertes VI Curated by Simon Barjou-Morant

Exposition du samedi 15 au vendredi 21 février de 11h à 19h, le samedi 22 février de 10h à 10h30.

Tout vient d’un constat : autour de nous les images ne ces...

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