Lepape de l’élégance

À partir de 1909, les Ballets Russes, portés par l’énergie sauvage de Nijinski et les décors et costumes de Léon Bakst, provoquent un enthousiasme inédit chez les spectateurs français.

Les comtesses Greffulhe et Noailles mènent le bal des louanges auprès de personnalités du monde de l’art comme Cocteau, Proust ou Rodin. Quant au couturier Paul Poiret, il est parmi les premiers à s’amouracher de cette féerie nouvelle aux tonalités orientales. La mode, jusque-là engoncée dans l’Art nouveau, renaît subitement ! Poiret se mue en costumier pour les Ballets Russes et rhabille avec audace toute la haute société parisienne.

En 1911, le couturier demande à Georges Lepape (1887-1971) de réaliser un album de dessins recensant ses nouvelles créations. Il l’envoie ensuite à 300 de ses clients, les plus privilégiés à travers le monde. À cette époque, Lepape est encore un jeune artiste. Formé chez Humbert, où il s’est rapproché de Picabia, Braque et Marie Laurencin, il intègre ensuite l’atelier de Fernand Cormon et, par la même occasion, le groupe d’artistes dandys qui s’y retrouvent. Aux côtés d’André Marty ou Boutet de Montvel, Lepape révolutionne le dessin d’illustration en fusionnant japonisme et modernisme. Sous l’influence de Poiret, Lepape fréquente les fêtes les plus délirantes de l’époque, comme la « Mille et deuxième nuit » dans l’hôtel de l’avenue d’Antin pour laquelle il imagine des costumes et des décors. Tombé lui aussi sous le charme des Ballets Russes, Lepape réalise des gouaches de Nijinski que le faune bondissant ne renie pas, loin de là !

Pendant la Grande Guerre, Lepape dessine plusieurs décors et costumes pour les ballets pantomimes donnés par Rip en 1915 et 1916 dans des théâtres parisiens, comme Les Maîtres de l’heure et L’Âge d’or des bêtes, dont nous présentons ici quelques projets. Sa dernière création est celle de L’Oiseau bleu de Maeterlinck, présentée au théâtre Mogador en 1923. La fondation de la Gazette du Bon Ton par Vogel en 1912 lui apporte une notoriété internationale. L’équipe d’illustrateurs comprend alors Baksy, Barbier, Lepape, Marty, Boutet de Montvel et, plus tard, Benito. Lepape continue son chemin et travaille en parallèle pour le Harper’s Bazar, Femina, Vogue puis Vanity Fair.

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