Les Redécouvertes, 1950-1990

samedi 14 janvier 2023 à 14:00

Tout vient d’un constat : autour de nous les images ne cessent d’éclore. Pourtant le monde nouveau semble redondant, le sentiment de déjà-vu devient lancinant. Sortons la tête du flux et sonnons ensemble l’heure des redécouvertes ! Prenons le temps de poser notre regard présent sur les créations des artistes de la seconde moitié du XXe siècle. Celles et ceux qui ont côtoyé le marché de l’art avant que la lumière ne s'en détourne. Celles et ceux qui ont fait leur parcours dans l’ombre, loin des éclats mondains. Celles et ceux sur qui nous souhaitons proposer un nouvel éclairage aujourd’hui.
Harold Rosenberg l’éprouvait déjà dans un article du New Yorker, en 1963* : « L’audience d’avant-garde est ouverte à tout. Ses représentants – conservateurs de musées, professeurs d’écoles d’art, marchands – s’empressent d’organiser des expositions et d’apposer des étiquettes explicatives avant même que la peinture ne sèche ou que le plastique ait durci. […] La tradition du nouveau a rendu banales toutes les autres traditions… » Il ne s’agit pas de faire l’éloge de la nostalgie mais de s’attarder sur le parcours d’artistes pour lesquels la « tradition du nouveau » s’est transformée en malédiction. Décélérer, pour contempler la peinture sèche, parfois craquelée, d’une époque encore récente, toujours actuelle, peut-être éternelle ?

Simon Barjou-Morant

* Réflexion sur la différence de réaction du public devant la première exposition de l’avant-garde à New York en 1913 (Armory Show) et celle d’un nouveau public.

Pourquoi acheter en vente aux enchères ?

« Enchérir » oublions un instant ce préfixe déroutant et concentrons nous sur l’essentiel : chérir. Car c’est de cela qu’il s’agit. L’achat aux enchères doit être un acte réfléchi, sur un bien profondément voulu. Une fois le marteau tombé, plus de retour possible : la propriété du lot est transférée au dernier enchérisseur ou à la dernière enchérisseuse. À celui ou celle qui l’a le plus désiré.
A notre époque où la surproduction et le consumérisme ont pu faire perdre son sens à l’acte d’achat, la vente aux enchères est là pour lui rendre ses lettres de noblesse.
Parfois injustement délaissées, jugées trop élitistes ou réservées aux initié·es, les enchères s’adressent en réalité à tous les publics. La pluralité des ventes embrasse la diversité des budgets. Ainsi, chacun·e peut prendre part au spectacle et jouer un rôle dans la vie de ces objets.
Dans le cadre d'une vente aux enchères comme celle-ci, le rôle de l'acheteur·se est d'autant plus significatif. Il ou elle apporte son soutien au travail de l'artiste, concourt à sa prospérité et à la diffusion de son œuvre. Chaque enchérisseur·se apporte sa pierre à l’édifice. Dans cette logique, les collectionneur·ses deviennent, chacun·e à son échelle, de véritables mécènes.

Paul Boulay

Exposition du samedi 7 janvier au vendredi 13 janvier 2023 de 11h à 19h, samedi 14 janvier de 10h à 10h30

Claude Viseux (1927-2008)

LOT 27

300 / 500 €

Vendu 416 €

(Commissions d'achat incluses)

Claude Viseux (1927-2008)

Série des Foules, 1956

Huile sur carton signé et daté au dos

30 x 30 cm

Claude Viseux, l’indompté « Être un observateur ne suffit pas. Il me faut prendre et restituer l'apparence des choses sous une autre forme pour mieux nier le réel. » — Claude Viseux Souvent - trop rapidement - vu comme l’auteur d’un œuvre inclassable, déroutant, nous vous invitons à jeter un nouveau regard sur 60 années de création de Claude Viseux. Ainsi, vous vous apercevrez peut-être, comme Geviève Bonnefoi l’écrivait en 1965, « qu’à travers des recherches si diverses, peut-on découvrir dans l’œuvre de Viseux une assez surprenante continuité, marque indiscutable de sa personnalité et de son tempérament. Il est un de ces artistes passionnés de technique et de connaissance qui tendent vers un art total, seul capable d’exprimer les différentes aspirations de l’homme actuel. » À travers un ensemble de 32 œuvres allant des premières toiles de 1949 (lot 23, L’Accouchement) aux derniers collages en 2007, nous vous proposons un voyage - un aller sans retour - dans l’œuvre d’un artiste sans concession. Ne serait-ce d’ailleurs pas la définition même de l’artiste ? Consacrer sa vie entière à créer, selon un chemin propre, sans jamais reculer, toujours pousser, renouveler la technique, remettre en question l’esthétique, innover, mélanger, bousculer le regard… Cette attitude en a déconcerté plus d’un, on ne l’a pas toujours comprise : passer de la toile à la sculpture, de l’huile au Ripolin, sculpter avec des os, peindre avec des crabes, assembler bronze et métal, revenir à la toile puis au bronze et assembler l’acier industriel, avec des soudures grasses… parsemer ce parcours, dédié à l’abstraction, de collages reprenant des éléments du réel pour former des chimères sorties d’eaux préhistoriques… Vous êtes perdus ? Pourtant l’œuvre est là, solide, bien ancré : l’univers marin, biologique s’allie merveilleusement à l’industriel et ils imprègnent chaque période de la carrière de l’artiste. Claude Viseux naît et grandit à Champagne-sur-Oise, en région parisienne. En 1946, il suit les cours d’architecture à l’École des Beaux-Arts de Paris, il rencontre alors Jean Prouvé et Constantin Brancusi et décide finalement de s’orienter vers la peinture. Le succès est presque immédiat, première exposition à la galerie Vibaud en 1952, dès 1955 ses œuvres sont montrées chez René Drouin, puis Daniel Cordier le choisit - pour sa toute première exposition ! - en 1956. En 1957, il a les honneurs de Léo Castelli à New York ! À partir de 1959-1960 il réalise ses premières sculptures avec des objets trouvés en bord de mer, des empreintes de pierres et d'algues coulées en bronze, puis vient l’acier industriel découpé, assemblé, soudé, à la manière de ses amis surréalistes Max Ernst, Man Ray, Henri Michaux… En 1972 il représente le pavillon français à la Biennale de Venise aux côtés de Christian Boltanski, Jean le Gac et Gérard Titus-Carmel et y dévoile sa fameuse série des Instables. La même année il installe une immense sculpture en acier inoxydable suspendue dans la station RER Auber, à Paris. En 1977, pour ses 50 ans, le Musée d’Art moderne de la ville de Paris organise une exposition « Viseux » de juin à septembre. Au cours des années 80 et 90, il multiplie les voyages en Inde dont les mythes et traditions se répandent subtilement dans ses dessins et collages, et l’on retrouve leur influence traduite en sculpture. Un an avant sa disparition, alors qu’il réside à Anglet - toujours au plus proche de l’eau - Claude Viseux continue ses collages mêlant univers marin et formes industrielles (cf. lots 54 et 55) troublants échos aux Expériences automatiques du crabe de 1956 (lof. Lots 30 et 31) et aux sculptures qui jalonnent son parcours. Résonnent alors les mots de Geneviève Bonnefoi : « à travers des recherches si diverses, peut-on découvrir dans l’œuvre de Viseux une assez surprenante continuité, marque indiscutable de sa personnalité et de son tempérament. » L’artiste n’a jamais cédé, jamais cessé d’exister, c’est à nous de continuer de faire vivre son œuvre unique et inébranlable.

Provenance

> Collection privée, Gironde

Authenticité

L’œuvre est référencée dans les archives Claude Viseux n°PH19560026

Rapport de condition

Légers frottements

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