« Une nouvelle génération de commissaires-priseurs » dans Les Échos

En dix ans, le secteur a été bouleversé par la concurrence et par Internet. Les nouveaux as des ventes manient aussi bien la souris que le marteau.

Libéralisation, globalisation, digitalisation, judiciarisation … Le métier de commissaire-priseur a, comme beaucoup d’autres, été très impacté ces dix dernières années , et une génération au profil différent accède au marteau. Damien Leclere, l’un des professionnels à l’ascension la plus fulgurante, le résume ainsi : « Nous sommes moins héritiers et plus entrepreneurs. » Celui qui a commencé il y a onze ans à Marseille puis a vite ouvert une antenne à Paris pour opérer à Drouot, et se trouve déjà dans le Top 15 des opérateurs français, incarne pleinement cette mutation. « On se sent libre de réinventer ce métier longtemps marqué par un certain conservatisme, on n’est plus formaté comme l’ancienne génération, on communique différemment sur les objets, sur notre marque », explique-t-il.

En témoigne le concept original lancé par FauveParis, dont les catalogues ressemblent à des magazines et la salle d’enchères à un lieu culturel avec son café-salon de thé. Ici, on s’adresse à « un public jeune » et on adjuge « dans une bonne ambiance », assure le site Internet. Fauve se targue aussi de faire des « ventes pas courantes » et n’hésite pas à investir de nouvelles niches comme l’art grec. Ce samedi, la maison de vente aux enchères propose « une vente hors-série hommage à Suzanne Lalique » avec des oeuvres des collections de la famille de l’artiste.

A Tours, Aymeric de Rouillac, passé maître dans l’art d’utiliser l’outil télévisuel (il a longtemps animé la chronique « Adjugé » dans la « Quotidienne » sur France 5), n’hésite pas à proposer des vidéos sur son site et à monter des « coups », comme cette vente d’art contemporain opérée au Centre de Création Contemporaine Olivier Debré, qui a suscité l’intérêt des médias. Celui qui anime avec son père Philippe les « ventes garden-party » au château de Cheverny – car il sait que les enchères doivent aussi être un spectacle – intervient aussi dans TV Tours et « La Nouvelle République ».

« Ce qui nous caractérise, c’est l’agilité », souligne Damien Leclere qui, lui, n’a pas hésité à creuser son sillon dans le secteur de la voiture de collection, pourtant déjà bien occupé par Artcurial, Bonhams, RM Sotheby’s, Osenat ou Aguttes. Et pour les exposer, il a investi la cour historique de la mairie du 9e arrondissement !

Avec une vision beaucoup plus internationale que leurs aînés, les jeunes commissaires-priseurs n’hésitent pas à s’inspirer des méthodes anglo-saxonnes. « Nous ne devons pas hésiter à diversifier nos services : conseil aux collectionneurs, aux artistes… Et innover dans la présentation des oeuvres, avec les changements digitaux, la 3D, la réalité augmentée, etc. » poursuit Damien Leclere. Lui-même couvre 15 à 20 spécialités différentes et ne réalise aucune vente généraliste, que des ventes thématiques pour plus de visibilité. Il a réduit au maximum les frais administratifs et logistiques. Chacun des 20 collaborateurs fait son secrétariat. Un fonctionnement de start-up et la croissance qui va avec : cette année, la maison Leclere espère réaliser 20 millions d’euros de produits vendus, contre 17 en 2016.

Martine Robert

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