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LOT 43

15 000 / 20 000 €

Bernard Boutet de Monvel (1881-1949)

Allégorie aux loisirs classiques, 1930

Huile sur toile signée en bas à gauche « Bernard B. de Monvel » ; datée, située et contresignée dans la composition « septembre 1930 à Nemours / Bernard Boutet de Monvel pinxit »

H. 21 1/8 in L. 46 1/2 in P. 0 in

Diameter: 0 in

À la toute fin des années 1920, Bernard Boutet de Monvel réalisait pour la bibliothèque de son hôtel particulier du très parisien
faubourg Saint-Germain, dont l’architecte Louis Süe venait d’achever la réalisation, deux peintures allégoriques représentant
pour l’une ses attributs propres (palette, règles, compas, etc.) (fig 1)
et pour l’autre ceux de sa femme d’origine chilienne (mappemonde, guitare, ananas, etc.).

Cette réalisation fut à l’origine de la commande, durant l’été 1930, du présent panneau et de son pendant, par Mrs. Henry H. Rogers Jr. née Mary Benjamin (1878-1956), ex-bru fraîchement divorcée du
co-fondateur avec John D. Rockfeller de la Santard Oil et mère de
l’excentrique et ultra-iconique Millicent H. Rogers (1902-1953),
égérie du Tout - New York qui inspira aussi bien en son temps Diana Vreeland et la duchesse de Windsor que, plus récemment,
John Galliano pour sa collection Christian Dior du printemps 2010.

Destinés à prendre place dans la bibliothèque de la maison de ville que possédait Mary Benjamin Rogers dans Manhattan, 4, Sutton Square, les peintures, sorte de « portrait chinois » de leur
sémillante propriétaire, furent encastrées dans une de ces boiseries de chêne couleur de miel alors particulièrement prisées de la Café Society américaine ; boiserie à laquelle devait précisément faire écho le raffinement tout maniériste du vert Véronèse servant de
fond à notre composition et dont la tonalité fauve de la reliure d’un des deux livres soutenant la lyre constituait un rappel.

Le premier de ces deux tableaux, « Allégorie aux loisirs classiques » évoque tant dans son projet à l’aquarelle (fig. 2) que
dans sa peinture achevée, la lecture, l’écriture et surtout la musique. Une musique figurée ici par une lyre à sept cordes,
instrument emblématique d’Apollon dont les lauriers animant l’arrière-plan de la composition sont une autre évocation, et par la
partition de « Six duo dialogués pour violons, alto et violoncelle
composés par Hayden, maître de Chapelle à Vienne » telle que l’on
pouvait en trouver dans les années 1780 « chez Mad.[eleine] Le Menu, rue du Roule, à la Clef d’or ».

Le 12 juin 1928, les Ballets russes créaient précisément à Paris
« Apollon musagète », un ballet néo-classique en deux tableaux composé l’année précédente par Igor Stravinski, qui put avoir inspiré à Bernard Boutet de Monvel ce thème, toutefois récurrent
chez l’artiste, et particulièrement cette lyre travaillée en un simple
et hypnotique aplat noir dans lequel le peintre se contenta d’inciser au stylet les élégantes volutes ornant les bras de l’instrument, lui conférant ainsi une saisissante modernité contrastant avec l’hyperréalisme de la partition.

La vision de Bernard Boutet de Monvel pour le second panneau, « Allégorie aux loisirs modernes » évolua en revanche quelque peu
entre l’aquarelle préparatoire et la peinture achevée, un téléphone
et un shaker à cocktail emblématiques de ce Jazz Age trépidant, initialement placés devant une raquette de tennis, des clubs de golf et une canne de battue, s’étant opportunément trouvés remplacés par un plus sage tablier de tric-trac, tandis que la prohibition faisait toujours rage ! (fig. 3).

Nous le savons, l’aïeul de Bernard Boutet de Monvel, François
Boutet, fondateur de la dynastie, fut au milieu du XVIIIe siècle « ordinaire de la musique de S.M. le roi de Pologne », Stanislas
Leszczynski, lorsque celui-ci vivait avec sa cour à Nancy. Le peintre, par ailleurs, unanimement adulé pour sa fracassante
beauté, avait été loué par la presse américaine dès son arrivée à New York en 1926, comme « the handsomest man in Europe ». Aussi n’est-il pas interdit de voir dans notre tableau évoquant
Apollon et la musique de Haydn, une manière d’autoportrait de Bernard Boutet de Monvel, dissimulé sous d’autres attributs que ceux imaginés pour sa propre bibliothèque, tandis que le second panneau figurerait la « Socialite » et « Philanthropist » Mary
Benjamin Rogers auprès de qui il trouva des années durant, tant à
New York qu’à Paris, un second foyer…

Stéphane-Jacques Addade
Vice-président de la Chambre européenne des Experts d’Art

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Légende des illustrations :

Fig. 1. Bernard Boutet de Monvel, Allégorie aux attributs de l'artiste, huile sur panneau, vers 1930. Coll. particulière (© D.
R.)

Fig. 2. Bernard Boutet de Monvel, Projet pour Allégorie aux loisirs classiques, aquarelle et crayon sur papier, 1930. Coll. particulière (© D. R.)

Fig. 3 Bernard Boutet de Monvel, Allégorie aux loisirs modernes, 1930. Archives Bernard Boutet de Monvel. Coll. stéphane-
Jacques Addade. (© D. R.)

Origin

> Ancienne collection de Mary Benjamin Rogers (1878-1956),
> Ancienne collection de l’homme politique américain Adlai Stevenson (1900-1965)
> Collection de son majordome Eric Werner Nilsson (1898-?), Stockholm (reçu en cadeau)
> Collection privée, Suède

Bibliography

> Stéphane-Jacques Addade, Bernard Boutet de Monvel, Éditions de l’Amateur, Paris, 2001, p. 278

Authenticity

Nous remercions Monsieur Stéphane-Jacques Addade, expert pour l’oeuvre de Bernard Boutet de Monvel, d’avoir confirmé l’authenticité de cette oeuvre et d’avoir rédigé cette notice. Un
certificat d’authenticité d’août 2025 sera remis à l’acquéreur.

Condition report

Une oeuvre en bon état général de conservation. Dès la création de l’oeuvre, ce dont atteste la photographie
d’archive montrant la toile tout juste achevée, Bernard Boutet de Monvel procéda à d’importants repentirs dans la partie supérieure de la composition d’où le peintre chercha tant à faire disparaître certaines feuilles de lauriers qu’à réduire la taille de celles conservées par lui. Les morceaux préexistants ainsi modifiés ayant
été simplement recouverts d’une nouvelle couche picturale sans que
la couche première n’ait été préalablement grattée et sans que les
temps de séchage nécessaires aient pu être respectés, certaines faiblesses de la couche de fond, dans la partie supérieure droite du
tableau, laissent à nouveau apparaître des feuilles de lauriers
initialement peintes. Un léger refixage de la couche picturale
secondaire présentant une mauvaise adhérence sur la couche picturale première, ainsi qu’une réintégration seront à envisager, afin de rétablir l’intégrité des repentirs tels qu’ils furent voulus par
l’artiste. Par ailleurs, le tableau, initialement enchâssé dans une
boiserie, fut découpé au ras de la peinture afin de l’en ôter. Des
bandes de tension ont été récemment placées pour monter la toile
sur un nouveau châssis tout en laissant le dos de l’oeuvre, présentant sa toile d’origine, parfaitement apparent.
En bon état de conservation général, la couche picturale n’a subit que d’infimes dommages ayant donné lieu à de rares et éparses réintégrations apparaissant essentiellement sur le fond de la partition et, pour l’une d’entre elles, sur le fond vert Véronèse en bordure de toile.

Vente Fauve #488

Saturday 30 August 2025 at 10h30

Art Moderne • Art contemporain • Design

Exposition du samedi 23 août au vendredi 29 août de 11h à 19h. Le samedi 30 août de 10h à 10h30.

Art Moderne • Art contemporain • Design...

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