Légendes d’automne – l’édito

Il était une fois un lundi soir d’automne, la pluie tombait comme chiens et chats, ou plutôt comme un Zeus d’or (de pièces Souverain sans aucun doute !) rejoignant Danaé… Quelle belle image pensai-je en me resservant un verre de vin – oh, c’est aussi la saison des vendages ! Les perles d’eau battantes me firent passer du rouge à la rosée, celle figée par Van Deel dans une œuvre aux détails si délicats de réalisme.

Qu’écrire sur les légendes, alors que j’étais plus habituée à rédiger celle des images ? Il se serait agit de représentations embellies de la vie, tels ces coléoptères rhinocéros, bestioles à la sonorité cauchemardesque et qui, grâce à la poétique technicité de René Lalique, s’élancaient pourtant avec tant d’élégance sur les volutes argentées d’un gobelet redécouvert par nos soins… [Soupir rêveur]

Braque sauta sur mes genoux. Mini-fauve cuivré, il n’aimait rien tant que se prélasser sur des assises, scandinaves et aux lignes racées de préférence. Aristocratique félin, qui essayait à présent d’attraper les gouttes qui continuaient de frapper à ma fenêtre. Sans doute devait-il s’amuser de voir tous ces passants pressés au dehors, personnages de SeguÍ allant et venant, dans leurs mondes et pensées, cent vies sans sens… voilà que je m’éloignais d’un récit à caractère merveilleux ! Enjolras d’ailleurs, me confortait dans cette ambiance mélancolique de rentrée, celle d’une élégante à la lumière d’intrigue et d’attente, nostalgique d’un futur déjà passé.

Les premières buées floutaient l’extérieur de ce début de soirée sombre. Il me revint à la mémoire des récits de ports, souvenirs reconstruits de bâteaux et de marins, de ciels bavards tels seul Ziem savait les dépeindre. Étais-je toujours à Paris ? Partie à Venise, en Normandie ? Un ami picard me distrayait soudain et voilà mon esprit vagabondant vers des histoires anciennes, à Tunis cette fois, pensées abstraites d’un Naccache vigoureux revenu à la narration, racontant alors par l’image un fond volubile remonté à la surface.

Mathieu, peut-être, osa me tirer de cette chaude torpeur automnale, par la vivacité de ses traits, son rouge franc sans nuances d’été déclinant… à jamais ? Ou fut-ce plutôt le regard pétillant d’une Marylin fluo, ou le sourire d’Anne-Charlotte, notre photographe, qui elle, sut basculer de l’été à la rentrée en gardant le sourire ?

Je finis mon verre, jetai une œillade à Braque assoupi et me plus à délicieusement rêvasser au craquement des feuilles orangées et à l’odeur des marrons grillés. Une saison d’interstices en somme, propice à la douceur d’une poésie triste et de contes mordorés.

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