Le fauve de la vente… un diable à l’improviste

Willy Ronis, observateur de génie, est l’un des photographes humanistes les plus marquants du XXe siècle. Si les mouvements de foule ont toujours fasciné cet œil hors du commun,les chats – noirs de préférence – ne le laissaient pas non plus indifférent.

Parfois, l’instant lui est offert. Parfois, Ronis guide le destin. Dans le cas présent, que fait ce petit félin ici ? Et pourquoi cette rencontre entre le photographe et ce chat, sombre et seul, en pleine nature ? Visiblement, le déclic de l’appareil a dérangé l’animal qui, jusque-là, ne se doutait de rien. Si les chats sont dotés de sens extraordinaires, ils n’en demeurent pas moins sensibles à la distraction. Même lorsqu’ils servent, temporairement au besoin, d’incarnation au Diable. Dévié de sa route par le cri d’une sorcière amie, il comprend bien trop tard qu’un photographe le guette.

Le félin le sait bien : le moment n’est jamais anodin et la sorcière doit poursuivre tranquillement ses activités. Doit-elle s’assurer que tout se passe bien lors d’une naissance au sein de son élevage de licornes ? Le chat doit faire le guet. Le photographe ne peut pas passer outre car il risque de surprendre un rituel et d’en trahir les secrets. Que faire ? On n’arrête pas un photographe d’un claquement de griffes ! Surtout un qui ne se laisse arrêter par rien s’il sent une bonne photographie à la clé…

Le Diable ne fait jamais de cadeaux sans contrepartie. Il offre à Ronis le talent très spécial de la capture des nombreux chats noirs qu’il a croisés au cours de sa (très longue) vie de chasseur d’images. En échange, il voile le reste de la pellicule utilisée ce jour-là. Quant au chat, orgueilleux et narcissique, il préfère garder l’attention fixée sur lui. Voilà pourquoi nous avons manqué un magnifique reportage sur les sorcières… et les licornes.

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