Et si Freud avait été notaire…

… Dali aurait-il été peintre ? 

Paris, 1929. Salvador Dali, figure du mouvement surréaliste, expose pour la première fois. Le succès qu’il rencontre est comme une renaissance après une histoire familiale douloureuse. Son père, un notaire austère et cassant, a donné salvador comme prénom à ses deux fils, le premier étant décédé prématurément. Ombre projetée d’un grand frère disparu, Dali a passé son enfance à être traité comme un enfant de substitution.

Depuis six ans, les surréalistes sont des avants-gardistes déroutants, explorant l’inconscient et s’inspirant des théories psychanalytiques nées à la fin du XIXe siècle. Mais…

… et si freud avait été notaire ?

Vienne, 1930. Salvador Dali, chauffeur de maître de son état et peintre à ses heures perdues, est en Autriche pour percevoir l’héritage d’un grand-oncle mort sans héritier. Dans la salle d’attente de l’étude Freud & Jung – notaires associés, il rêvasse. Il jalouse plus que tout son compatriote Picasso, fer de lance du mouvement naïviste-tribaliste, inspiré des arts populaires africains, dont le succès ne se dément pas.

« Maître freud aura du retard », lui indique la secrétaire. À la bonne heure, se rassure Dali. Un imposant monsieur barbu finit par arriver et lui lance : « Maître Sigmund Freud, enchanté. Vous êtes mon héritier ? Suivez-moi ! ».

Dans le bureau de Maître Freud, son oeil est attiré par un mur couvert de montres ainsi que par une édition d’Oedipe Roi de Sophocle posé sur une étagère. Dali, rompant un silence pesant : « Mon père aussi était notaire.
– Vraiment ? Et se comportait-il en père ou en patriarche ?
– Je n’en sais rien… Mais j’ai toujours eu envie de le tuer.
– Intéressant, murmure Sigmund Freud en se grattant la barbe ».

Puis le vieux notaire autrichien ouvre un coffret, dévoilant une montre en or : « le voici, votre héritage ! ». Dali reste interdit. Maître Freud, impassible : « Ne me demandez pas d’interprétation… ».

De retour en France, Dali ne parvient pas à se remettre à la peinture. Cet étonnant personnage rencontré à Vienne le perturbe. Depuis plusieurs nuits, un rêve le hante : des montres et des pendules virevoltent dans un univers lunaire. Puis Maître Freud apparaît et répète en boucle : « ne me demandez pas d’interprétation, ne me demandez pas d’interprétation… ».

De toute évidence, cette rencontre étonnante l’a changé ; ce petit homme barbu est parvenu à lui faire remonter le temps. Soudain, la montre en or oubliée dans un tiroir se met à sonner, sortant Dali de ses réflexions. Sans réfléchir, le jeune artiste contrarié brise ses pinceaux et jette son matériel de peinture par la fenêtre. Admirant la montre en or qu’il a rapportée de Vienne, Dali comprend qu’il fait fausse route : espérer percer comme peintre est une idée farfelue, surréaliste. Son destin est tout tracé : il sera notaire lui aussi, comme son père. Et comme ce mystérieux Sigmund Freud.

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