Entre chien et loup – l’édito

Eh bien non, ce ne sera pas une vente de vénerie, comme une membre de l’équipe FauveParis a pu le croire à l’annonce du titre de cette vacation. Mais un parcours, une ambiance et des œuvres tout en nuances.

Entre chien et loup, c’est l’une des plus belles expressions de la langue française. Les Romains déjà l’utilisaient, inter canem et lupum, pour désigner ce moment d’entre-deux entre la fin du jour et la tombée de la nuit. Les quelques minutes où le ciel est déjà d’un bleu profond mais encore lumineux, pas encore marine mais plus vraiment azur ; une couleur difficile à figer, propre à la mélancolie comme à l’excitation des mystères de la nuit à venir. Entre chien et loup c’est l’espace de tous les possibles, suspendu entre le pâle quotidien du jour passé et les ombres noctambules cobalt.

C’est d’ailleurs à ce moment qu’on aperçoit notre Femme à la boule délicatement brossée par Jean Dupas. Elle tient pour un instant, un instant seulement, une boule de cristal; y lit-elle d’insondables promesses ? ou nous montre-t-elle des souvenirs de 1926, alors qu’elle accompagnait magnifiquement les œuvres de Ruhlmann au Salon des artistes décorateurs ?

Minutes de délicatesse et de subtilité, surprises en suspens: un taureau prêt à charger, des poissons qui se multiplient, une fière guerrière chryséléphantine, des Rois mages, un chat mazouté… On navigue entre le carnaval des animaux et David Lynch ! Laissez-vous surprendre par les apparitions (seraient-ce des disparitions ?) dans les pages qui suivent. Point de menace mais une heure bleue qui traverse les âges et les continents, de l’Asie à l’envi, des Tourments de Cupidon, une grotte italienne, un Sumida Gawa, Tamara de Lempicka…

Mais quelle heure est-il ? Il est minuit. La nuit est tombée, on sent le frisson du béton et de l’acier de nos dernières pages, et on croit même entendre quelques hurlements de loups-garous. Oh yeah !

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